Créer, jouer, transmettre : et si l'écriture ludique devenait un outil puissant ?
- Manon Arbaud
- 8 août
- 3 min de lecture
On imagine parfois que l’écriture, pour être utile ou transformatrice, doit forcément être sérieuse, pesante, presque grave. Mais ce serait oublier qu’un des pouvoirs les plus forts de la création, c’est le jeu.
Créer des consignes farfelues. Écrire à partir d’un dé. Tirer un mot au hasard. Inverser les rôles. Imaginer une vie qui n’est pas la nôtre. Ou même tout simplement… inventer n’importe quoi.
Bienvenue dans l’écriture "gamifiée" (pour les amateur d'anglicismes !).
Une approche qui désacralise, qui déverrouille, qui enthousiasme. Et qui s’avère précieuse bien au-delà des apparences — pour soi, mais aussi pour accompagner les autres, transmettre ou simplement… se faire plaisir.
Pourquoi jouer ?
Parce que le jeu est une porte d’entrée.
Il dédramatise.
Il stimule la motivation et la créativité.
Il contourne les résistances (à l’écrit, à soi, aux émotions).
Il génère de l’enthousiasme (souvent contagieux !).
En atelier ou en accompagnement, il permet à chacun de s’exprimer sans pression de performance, sans peur du jugement, sans avoir à tout expliquer.
Et surtout… il donne envie de recommencer.
Une approche idéale pour les publics jeunes (et pas que)
Je suis régulièrement sollicitée pour animer des ateliers en collèges. Et ce qui m’a frappée, c’est que les adolescents — souvent réticents à « écrire » au sens scolaire du terme — se saisissent avec un plaisir fou de propositions créatives et décalées.
Et le résultat est souvent… bluffant !
Le jeu d’écriture crée un espace de liberté, d’expression, de confiance. Il permet d’aborder des sujets profonds, personnels ou complexes sans les imposer. Et de découvrir, parfois, qu’on aime écrire.
C’est un levier idéal pour :
Les enseignants, notamment autour des programmes (la biographie en 3e, l’autoportrait, l’imaginaire…)
Les professionnels de l’accompagnement (coachs, thérapeutes, éducateurs…)
Les parents, qui souhaitent créer des moments de partage ou offrir une soupape expressive
Des outils simples à expérimenter
Voici quelques exemples de jeux d’écriture faciles à proposer (en groupe ou en individuel) :
Le portrait chinois inversé : « Si j’étais un objet, je ne serais surtout pas… »
La lettre que je n’enverrai jamais : un classique revisité avec un ton humoristique ou poétique
Les dés narratifs : inventer une histoire en lançant des dés (ou en tirant des images au hasard)
Les phrases interdites : raconter une anecdote sans utiliser certains mots-clés
Changer de prisme : raconter un souvenir du point de vue d’un autre personnage
...
Ces propositions, simples en apparence, peuvent débloquer des choses profondes, révéler une singularité, créer du lien.
Et surtout : elles rendent l’acte d’écrire joyeux ! Ce sont généralement des séances remplies de rires !
Pas que pour rire : la fiction comme levier
Ce n’est pas parce qu’on joue que c’est creux. Au contraire !
L’écriture ludique peut devenir :
Une voie vers soi (sans passer par la case « introspection frontale »)
Un déclencheur de parole dans un cadre d’accompagnement
Un moyen de travailler des notions littéraires en classe (narrateur, chronologie, voix, genre…)
Un espace de création libre pour les jeunes (et moins jeunes)
Elle est donc une alliée précieuse dans l’éducation, le soin, la parentalité, ou simplement dans la vie.
Et parfois, ce qui émerge d’un petit jeu de mots ou d’un cadavre exquis vaut bien des grandes théories.
Ce que je retiens
J’ai vu des ados « déconnectés » se passionner pour une histoire qu’ils inventaient ensemble. J’ai vu des adultes dire des choses très vraies… derrière une consigne absurde. J’ai vu des thérapeutes intégrer un jeu d’écriture dans leurs séances avec des résultats puissants. J’ai vu des enseignants redécouvrir leurs élèves.
Et à chaque fois, la même chose : le jeu ouvre un passage.
Alors non, la "gamification" de l’écriture n’est pas un gadget. C’est une stratégie sensible, joyeuse, féconde.
Et elle mérite pleinement sa place dans nos pratiques — qu’on soit professionnel ou simple explorateur.
Seriez-vous intéressé par une formation en ce sens ?
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